dimanche 19 août 2012

Alien Breed (Amiga, XBLA, Steam) Team17

"Alien Breed" de Team17 est une série née sur Amiga en 1991 ; on pourrait brièvement décrire son premier volet, analysé en détail plus bas, comme un jeu de tir futuriste vu du dessus. C'est un incontournable de la machine, qui fait partie des quelques jeux Amiga auxquels j'ai encore du plaisir à jouer aujourd'hui (et un des rares que j'avais achetés à l'époque sans le regretter).

Près de vingt ans plus tard, Team17 (surtout connu pour la série des "Worms") a annoncé un reboot de la série, réparti sur trois jeux publiés sur les principaux services de téléchargement (puis au format boîte une fois la trilogie complétée).
Lors de la sortie fin 2009 du premier épisode sur XBLA, "Alien Breed Evolution", les critiques furent à peu près unanimes : le jeu, totalement repensé et modélisé en 3D, était très beau, mais son gameplay était bien trop simple et répétitif. IGN, fidèle à lui-même, écrivait : "Quiconque ayant joué à l'époque à l'Alien Breed original retrouvera ici son shooter 2D basique à l'état adulte, avec de jolis effets d'éclairage, une bande-son atmosphérique, et des cinématiques impliquant bien le joueur, mais le gameplay lui-même a ses racines en 1990."


De critique en critique, on retrouvait la même idée : si un remake d'un jeu vidéo vieux de vingt ans avait un gameplay limité, c'était naturellement parce qu'il était trop proche de l'original (ceci venant de la part de gens n'ayant jamais joué à l'original). L'à priori est ici limpide : les expériences vidéoludiques modernes seraient plus profondes, variées et exigeantes que celles des "vieux" jeux, qui seraient elles "basiques", répétitives et superficielles.

Or, il se trouve précisément que "quiconque ayant joué à l'époque à l'Alien Breed original" et ayant eu la mésaventure d'acquérir "Alien Breed Evolution" sait que c'est l'inverse : c'est justement parce que "Alien Breed Evolution" est "moderne" qu'il a délaissé les caractéristiques de l'original, et que, n'ayant pas compensé ce manque par d'autres mécaniques, il ne vaut pas le jeu Amiga.

Voilà une bonne occasion de parler d'un très bon jeu d'il y a vingt ans, de le comparer avec son (également bon une fois passé le premier volet sur XBLA) reboot, en d'en tirer des observations sur l'évolution du jeu vidéo ! Et, au passage, d'en profiter pour parler de "Alien Syndrome", le jeu d'arcade de SEGA qui ressemble beaucoup à "Alien Breed" mais n'a absolument rien à voir !

Un petit détour du côté de chez SEGA ("Alien Syndrome")

Précédant "Alien Breed" de quatre années, "Alien Syndrome", jeu d'arcade sorti en 1987, lui ressemble sur le papier comme deux gouttes d'eau : tous deux sont des jeux de tir en 2D vus du dessus et sont jouables seul ou à deux en coopération ; tous deux sont très fortement inspirés par "ALIEN" et surtout "Aliens" (sorti en 1986), nous faisant affronter des hordes extraterrestres bestiales dans des labyrinthes métalliques (ou organiques) sous la menace de l'autodestruction imminente d'une station spatiale ; tous deux partagent un panel d'armes similaire (arme de base, boules d'énergie, lance-flamme, laser) et comportent des bornes où l'on peut consulter la carte du niveau en cours ; tous deux ont des boss énormes, voulus spectaculaires...


En fait, leurs similitudes sont telles que l'on cite souvent "Alien Syndrome" pour décrire en deux mots "Alien Breed". Pourtant, je ne connais pas de plus parfaits faux amis, les deux jeux étant sur le fond complètement différents, et donc, passionnants à comparer.

Sur le fond, donc, "Alien Syndrome" est un jeu d'arcade typique, à savoir une évolution des jeux à tableaux avec collecte à la façon de "Pac-Man" : on y a comme objectif de se promener librement dans un labyrinthe de taille et de complexité réduites, très ouvert, afin d'y ramasser suffisamment d'éléments (ici des "camarades") pour avoir le droit de passer au niveau suivant, tout en devant composer avec des ennemis que l'on peut tuer ou simplement éviter.
Comme dans "Pac-Man", les ennemis en question ne foncent pas forcément sur le héros, ils vivent leur vie en suivant des patterns différents selon leur nature (une ou deux races par niveau). Ils constituent le sel du jeu : leur apparence (délicieusement "pulp") et leurs méthodes d'attaque et de reproduction varient de niveau en niveau, ils correspondent souvent à une arme plutôt qu'à une autre (on ramasse celles-ci dans des distributeurs à des points fixes), et ils doivent chacun être appréhendés différemment. C'est bien sûr encore plus vrai pour les boss, très impressionnants et originaux, meurtriers lors des premières rencontres et une formalité quand on les connaît bien.

Le jeu n'est pas très dur dans ce qu'il demande de faire : l'architecture des niveaux est simple, intuitive et souvent symétrique, il est facile de s'y repérer. On n'utilise que le stick et un unique bouton : quand on ramasse une arme, elle remplace l'actuelle, et il n'y a pas de munitions. Les monstres (en dehors des boss et des générateurs de monstres) meurent au premier coup, les armes ont donc la même puissance mais varient par leur portée, leur débit etc. Et surtout, on n'est pas obligé de sauver tous ses "camarades", ce qui laisse une marge confortable par rapport au compte à rebours présent dans chaque niveau.
La difficulté du jeu, assez élevée, réside en fait dans le nombre de vies : trois, sans aucun moyen d'en gagner (en dehors d'une astuce absconse permettant d'en gagner deux au maximum), sachant que l'on meurt au moindre contact avec un monstre ou un projectile, et qu'il n'y a pas de "continue" en solo. Autant dire que les erreurs sont fatales et que les émotions sont fortes.


Structurellement, la borne d'arcade incitait clairement à jouer à deux, puisqu'on peut alors "continuer" avec de nouvelles pièces et voir facilement tout le jeu, mais l'impitoyabilité du mode solo présente un défi très stimulant car on arrive malgré tout à y progresser régulièrement si on est prudent et méthodique. Et il y a ensuite la question du score : on peut tenter de sauver tous ses camarades, ce qui accorde un bonus qu'il faut comparer avec le bonus de temps afin de déterminer lequel est le plus juteux, on peut varier son parcours pour grappiller du temps ou gagner plus de points en tuant plus de monstres, on peut limiter les risques pour exploser son score en faisant plusieurs boucles (on recommence du début quand on a gagné le jeu), etc.

Même s'il est nettement daté (ce qui fait partie de son charme, le jeu a beau s'inspirer de "ALIEN" il n'a pas sa sobriété "réaliste", vive les monstres roses avec des taches vertes et deux ou trois bouches), "Alien Syndrome" est donc toujours autant intéressant et amusant à jouer, avec un défi finement réglé et une certaine liberté dans la stratégie de scoring.

Player one requires keys ("Alien Breed" sur Amiga)

Si "Alien Syndrome" est un jeu d'arcade japonais typique, "Alien Breed" est lui un jeu sur micro-ordinateur occidental typique. On pourrait presque le résumer à son seul pitch, à savoir :

"Alien Breed" (1991) = "Gauntlet" (1985) + "Aliens" (1986) + maîtrise technique et artistique de l'Amiga

Ce dernier point est assez important, d'ailleurs, car il explique en bonne partie le succès du jeu, et était une marque de fabrique de Team17 (nommé ainsi car la moyenne d'âge dans la compagnie était alors de 17 ans, ça ne nous rajeunit pas).

Le ton et la qualité visuelle du jeu sautent aux yeux dès son niveau d'introduction : très calme, court (on peut littéralement le passer en vingt secondes) et comptant peu de monstres, il sert de simple tutoriel. La baie d'amarrage de la station ISRC-4, sur laquelle on débarque pour enquêter sur son inquiétant silence, est rendue avec un vrai luxe de détails : vaisseaux stationnés, instructions au sol, ventilation, ordinateurs, relais de câblage...


Comme dans le reste du jeu (hors séquences spéciales), il n'y a pas de musique, juste quelques effets sonores relatifs à la station ou à l'action, avec de temps à autre la voix froide et monocorde de l'Intex System (l'équivalent de MU/TH/UR dans "ALIEN") qui égraine des informations. Le cadre et son traitement sont en fait si réalistes (pour l'époque) que, avec l'absence sinistre d'êtres humains vivants ou morts (ou même de traces de sang), on a vite des flashbacks des scènes tendues de "Aliens" où les marines explorent la base déserte de LV-426.

L'ambiance du jeu ainsi posée, on découvre rapidement le gameplay. Dès les premières rencontres avec les extraterrestres, on se rend compte de deux choses : en 1991, on pouvait copier exactement les designs d'une série de films très populaires sans s'attirer de procès ; et le programme de l'intelligence artificielle des ennemis vient tout droit de "Gauntlet", c'est-à-dire que ceux-ci semblent toujours savoir où l'on se trouve (même si une paroi nous sépare) et ils tentent toujours d'aller droit dans notre direction (même s'ils butent contre un mur en ignorant une issue juste à côté). Les développeurs ont bien tenté de varier leur comportement quand ils ne sont pas en chasse, mais ils semblent alors erratiques, loin de l'illusion de vie de "Alien Syndrome" qui faisait de nous un intrus dans un écosystème étranger, alors que les créatures de "Alien Breed" restent robotiques et passent leur temps à rester bloquées ou à attendre sagement en file indienne de se faire descendre par notre pistolet mitrailleur.
À ce sujet, on constate que plusieurs coups sont ici nécessaires pour venir à bout des monstres, alors qu'arriver à leur contact les anéantit instantanément en nous ôtant juste un peu d'énergie : encore une fois, le contraire de "Alien Syndrome" et la même chose que "Gauntlet".

De nombreux éléments au sol peuvent être ramassés : des trousses de soins (non stockables et utilisées immédiatement), des munitions (communes à toutes les armes), de l'argent (des cartes d'un montant de 100 ou de 1000 crédits), et des clefs. Celles-ci, comme dans "Gauntlet", ouvrent n'importe quelle porte standard puis disparaissent, l'autre type de portes étant coupe-feu, se fermant définitivement si on tire sur leur système de commande : on peut ainsi couper la route à toute une meute d'extraterrestres qui nous poursuit, immersion garantie !


Arrivé à la fin de ce premier niveau (c'est-à-dire à l'ascenseur menant au niveau suivant), on réalise que l'on n'a emprunté que l'un des passages possibles pour arriver jusque-là et qu'il y a encore de nombreuses salles à explorer après l'ascenseur. Que faire ? Ignorer ces salles qui renferment peut-être des éléments importants pour notre survie ? Les visiter au risque de perdre inutilement des clefs, des munitions, et de la santé ? Faire demi-tour pour jeter un œil sur les autres chemins menant à l'ascenseur ? Mais dans ce cas, ne serait-on pas bloqué par les portes coupe-feu que l'on a soi-même fermées ?

Tout "Alien Breed" est là. Autant le dire tout de suite, même si les cinq niveaux suivants apportent des variations dans le sprite des ennemis (celui du cinquième niveau s'inspire directement de "Predator"), et si des monstres de taille différente apparaissent dès le deuxième niveau (d'abord les araignées pondeuses de "ALIEN", puis au troisième niveau les fœtus qui en sont issus), tous sont interchangeables : aucune variation de comportement, de déplacement ou d'attaque, pas de projectile, rien. Il y a bien quelques "boss", mais ceux-ci sont juste là pour marquer le coup, n'étant que de gros sprites qui se déplacent sans rien faire (au pire, il suffit d'aller dans un coin de la pièce pour se protéger de leur contact mortel).
En réalité, les extraterrestres de "Alien Breed" sont juste un des moyens de structurer la véritable problématique du jeu, celle de la gestion des ressources et de l'exploration de la station.
Comme le temps n'est pas limité dans la phase de jeu principale, ce sont les monstres qui font que chaque déplacement a un coût, soit en munitions (si on les tue), soit en santé (si on les touche) : contrairement à "Alien Syndrome", où l'on pouvait globalement "nettoyer" des zones, les créatures de "Alien Breed" sont générées à l'infini, soit par les trous d'où elles surgissent sans qu'il soit possible de les combler, soit par génération spontanée - si on quitte une salle en cul-de-sac puis qu'on y retourne, il y a de bonnes chances qu'on en trouve là quelques-unes, sorties de nulle part. Faire des allers-retours inutiles peut donc vite s'avérer dangereux, et on apprend rapidement à rationaliser nos déplacements pour ne pas se retrouver démuni - notre survie en dépend.

La gestion des ressources est bien sûr enrichie par les magasins : il suffit d'utiliser n'importe quel ordinateur de ISRC-4 pour se connecter à l'Intex System, qui nous permet de dépenser notre argent en munitions, soins, packs de six clefs et en armes (plus sur ce sujet plus loin) ; ainsi que consulter (ou acheter en version portative pour seulement 500 crédits) la carte du niveau en cours.


L'image ci-dessus n'est pas celle d'un circuit intégré, c'est bien la carte du second niveau, encore bien modeste. Notre position est marquée par le gros curseur vert (l'emplacement de l'ordinateur le plus proche de l'ascenseur), les traits verts sombres sont des portes fermées (qui, donc, "coûtent" une clef chacune), la destination n'est pas marquée par l'Intex System mais l'est par la carte portative, il s'agit toujours de la salle la plus grande et la plus dégagée (ici au milieu à droite). Inutile de dire que la première fois que l'on consulte une carte dans "Alien Breed", ça fait un choc, on comprend tout de suite qu'explorer la station au petit bonheur la chance serait suicidaire...

Bref, disons-le tout net : "Alien Breed" est un jeu de labyrinthe, doublé d'un jeu de survival horror... le véritable antagoniste du jeu, c'est la station, tout comme "ALIEN" était en quelque sorte un film de maison hantée : le jeu émule parfaitement ces passages dans "ALIEN", "Aliens", et "ALIEN³" où Ripley et ses camarades se penchent sur des cartes complexes pour élaborer un plan de survie, qui tombe toujours à l'eau à cause d'un imprévu. Et en l'occurrence, les cartes de "Alien Breed" sont incomplètes : elles n'affichent pas les portes coupe-feu (dont certaines sont déjà fermées), les trous, les sens uniques, ainsi que divers éléments de level design renouvelés dans les niveaux suivants. Plus d'une fois on se sent donc comme Ripley désespérée, hurlant à l'ordinateur de bord : "Maman ! J'ai rebranché les circuits de refroidissement !" alors que le Nostromo, imperturbable, continue le décompte du temps qui le sépare de l'autodestruction.

À ce sujet, comme on a pu le déduire des chiffres en silhouette sombre sur les captures d'écran, il y a bel et bien des phases avec temps limité dans "Alien Breed" : arrivé à la destination d'un niveau et après avoir en général affronté un "boss", on déclenche un processus d'autodestruction avec minuterie. Tout devient alors rouge à l'exception des lumières bleues, une grosse musique et une sirène démarrent, l'Intex System répète : "WARNING - DESTRUCTION IMMINENT" calmement en boucle, et on doit se précipiter vers l'ascenseur d'où l'on vient (maintenant à l'autre bout du niveau) si on ne veut pas se confronter au Game Over.
Bien entendu, le chemin du retour n'est jamais exactement celui de l'aller, et quand ils se croisent, on peut se heurter à des portes coupe-feu que l'on a imprudemment fermées auparavant (il est également fréquent de fermer une de ces portes accidentellement dans le feu de l'action, les monstres sont très nombreux lors de cette phase et la panique vient facilement).


Comme on peut le voir, "Alien Breed" n'a pas besoin d'ennemis sophistiqués pour adapter remarquablement "ALIEN" et ses suites (on pourrait d'ailleurs argumenter malicieusement que c'est un peu la même chose pour les films) ; les combats ont une simplicité qui complète très bien la densité du level design et la gestion très serrée de l'inventaire.
Les armes, du coup, sont secondaires, et un peu là "pour la galerie" : parmi les six types d'armes disponibles, je ne recommande vraiment que le "Intex Plasma Shotgun", mon chouchou en vingt ans de pratique de ce jeu. Les autres armes sont soit trop faibles pour leur prix (voire inutiles, dans le cas du lance-flamme) soit dangereuses car ayant des projectiles qui rebondissent contre les murs et ferment donc toutes les portes coupe-feu à proximité. Le "Intex Plasma Shotgun", lui, tire à peu près droit, a une bonne puissance, et surtout ses tirs traversent les ennemis, ce qui fait que l'on peut exterminer toute une file de monstres en quelques coups. Si on veut vraiment être très prudent, on peut toujours revenir à l'arme de base (qui a de loin le tir le plus précis) à proximité de certaines portes coupe-feu (on peut changer d'arme en cours en appuyant sur 'Alt').

Point de vue difficulté, "Alien Breed" est un jeu impitoyable lors des premières parties, mais il n'est pas réellement dur une fois qu'on l'a bien compris.
Au début, on se perd souvent, on se retrouve bloqué sans clef ou munition (on n'a alors plus qu'à se suicider ou se laisser tuer), on explose avec l'autodestruction du niveau, ou on rend la sortie définitivement inaccessible à cause d'une porte coupe-feu fermée par inadvertance... mais d'un autre côté, une fois que l'on a trouvé un chemin et une stratégie qui fonctionnent, il est très facile de les reproduire de partie en partie, ce qui fait que l'on progresse constamment si on est méthodique, apprenant à optimiser notre trajet petit à petit en faisant les bons détours et les bonnes dépenses (en clefs, argent, et munitions), pour au bout du compte obtenir le plus de ressources possible en prenant le moins de risques possible, et en allant toujours plus loin.
Comme de plus, le jeu ne compte que six niveaux avec un premier et un dernier niveaux d'assez petite taille, et le jeu pouvant donc se boucler en une demi-heure quand on le connaît bien, il reste très abordable, et l'originalité de son gameplay comme la variété de son level design sont très motivantes, donnant envie de voir ce que nous réserve le niveau suivant (j'ai une nette préférence pour le troisième niveau avec ses plans inclinés, ses tranchées, ses plateformes mouvantes et ses aliens avec d'énormes yeux bleus qui luisent lors de la phase d'autodestruction).


Au final, comme on l'a dit, "Alien Breed" a une formule typique d'un jeu sur micro-ordinateur : la performance technique et surtout artistique est notable, et comme les deux premiers "Turrican", autres classiques de l'Amiga, il a un design hérité de nombreux jeux sur micro-ordinateurs 8-bit, consistant à avoir une liberté d'action importante et une carte très grande, avec de 25% à 75% de la surface d'un niveau que l'on peut royalement ignorer pour en arriver au bout (impensable en arcade ou sur consoles de l'époque). L'idée, probablement liée à l'ambition de simulation qu'il y avait alors chez les programmeurs sur ordinateur, était de créer un vaste environnement dans lequel on laissait le joueur se débrouiller, plutôt que de le guider dans une expérience balisée : si on veut, "Spindizzy" plutôt que "Marble Madness". Le défi pour le joueur était de trouver ce qu'il fallait qu'il fasse, plutôt que l'exécution de ce qu'il fallait faire.
C'est aussi un jeu qui m'a à l'époque occupé pendant des mois, alors qu'on peut le finir, donc, en une demi-heure quand on sait ce que l'on fait, témoin d'une époque où le temps que l'on passait à maîtriser un jeu était plus important que son contenu en matière de décors ou de kilométrage (aujourd'hui, malgré son travail de design, un jeu comme "Alien Breed" serait invendable autrement qu'en micro-application à moins d'un euro sur téléphone portable).

Il faut noter qu'un an après "Alien Breed" sortit une extension, "Alien Breed Special Edition 92". C'est un cas d'école intéressant, puisque cette édition ne change strictement rien à part les niveaux (entièrement nouveaux, même s'ils tirent tous leurs graphismes et éléments du premier jeux) et quelques détails (des prix d'articles et autres choses dérisoires), mais cela en fait un jeu totalement différent. Le nouveau level design, très artificiel et délibéré, très "construction kit", essaie de fournir une expérience narrative et linéaire qui échoue à mon avis lamentablement : les mécaniques de combat de "Alien Breed", comme on l'a dit, sont inintéressantes en soi, et le jeu est donc très laborieux puisqu'il ignore ce qui faisait l'intérêt du premier. C'est à mon avis la même chose pour les deux suites de "Alien Breed", "Alien Breed II" et "Tower Assault", très étalées, poussives, et laides (où sont passés les graphistes du premier) ? Sur Amiga, pour moi, le premier reste l'unique.

Régression ("Alien Breed Evolution")

Autant je me suis agacé des postulats erronés de certains journalistes sur le "Alien Breed" de l'Amiga, autant je suis d'accord avec eux en ce qui concerne "Alien Breed Evolution".


Tout d'abord, le qualificatif de "plus beau jeu du XBLA", que j'ai lu un peu partout, ne me paraît pas démérité, le jeu est visuellement une merveille. Les graphistes de Team17 ont réussi une gageure : faire une version moderne, c'est-à-dire tridimensionnelle, très sombre et réaliste (voire glauque) des visuels de "Alien Breed", tout en conservant l'esprit et la patte graphique de 1991. Le résultat m'a beaucoup rappelé le style de "Metroid Fusion" (GBA), qui arrivait à être sombre et plausible tout en étant coloré et "pulp" ; et il évoque aussi intensément le "ALIEN" de Ridley Scott, plus que les suites de Cameron ou Fincher.
Le jeu est donc très réussi artistiquement, mais il l'est aussi techniquement. On ne peut qu'être impressionné par l'ambiance sonore, très subtile et fouillée, ainsi que par les détails apportés aux décors, presque chaque salle présentant un aménagement spécifique : vestiaires, chambres, toilettes, débarras, serres, salle à manger, salle de tests médicaux, chambre des réacteurs... on s'y croirait. Le travail effectué sur les lumières, les textures, les modèles et accessoires donne le vertige.

Ici, le prétexte de l'action n'est pas emprunté à "Aliens" mais au jeu de plateau "Space Hulk" : en mission diplomatique, le vaisseau spatial Leopold entre en collision avec un gigantesque vaisseau fantôme, d'où proviennent des hordes de monstres. Il faut survivre à la collision et essayer à tout prix de séparer les deux vaisseaux, aidé en cela par l'androïde MIA, qui nous guide par contact radio dans nos opérations. Les créatures ne sont plus directement copiées sur "ALIEN", la défense du copyright étant de nos jours ce qu'elle est ; au lieu de ça, leur forme générale est empruntée à "Starship Troopers", mais avec des tons et des textures toujours inspirés de "ALIEN", le résultat étant sans grande personnalité mais satisfaisant.

Sur le papier, les mécaniques du jeu semblent bien retranscrire le "Alien Breed" original tout en le modernisant : le level design est très très dense, avec beaucoup de petites salles imbriquées les unes dans les autres dans un tracé labyrinthique ; les monstres sortent toujours de trous créés soudainement sans prévenir, et ils foncent toujours directement sur notre héros, Conrad, mais cette fois sans se prendre dans les portes ou dans les angles. Conrad peut encaisser plusieurs coups et a besoin d'un certain nombre de munitions pour tuer les grosses créatures, son panel d'armes est similaire au jeu original, et il peut toujours ramasser des kits de soins, des munitions et des clefs qui se trouvent au sol, ou sur des cadavres, ou dans des casiers (nuance notable : les munitions sont ici propres à chaque type d'arme).


Le jeu, parallèlement, a été modernisé par ses graphismes bien sûr, mais aussi par ses contrôles dual analog, c'est-à-dire que l'on dirige Conrad avec le stick gauche, que l'on vise avec le stick droit, et que l'on tire avec la gâchette droite de la manette. On peut aussi recharger son arme, courir jusqu'à perdre haleine, donner des coups de crosse pour tuer les petites créatures ou se dégager des mandibules des grosses, et utiliser directement divers éléments de son inventaire : grenades, kits de soins, armures, et même des mitrailleuses robotisées que l'on peut brancher sur des points d'alimentation façon "Aliens". Un radar, lui aussi sorti tout droit de "Aliens", se situe en haut à droite de l'écran et localise utilement les ennemis cachés dans l'obscurité ou placés hors de la zone de jeu. L'action est également plus scénarisée, avec une suite d'objectifs précis à suivre.

On peut donc facilement comprendre les journalistes ne connaissant rien au jeu Amiga d'origine : à priori, "Alien Breed Evolution" semble adapter celui-ci correctement. Il n'a cependant strictement rien à voir avec son prédécesseur - ce n'est pas le même genre de jeu, il n'offre pas les mêmes mécaniques ludiques, et il n'a pas la même qualité de finition.

L'erreur de "Alien Breed Evolution", c'est de ne pas choisir son camp. Le jeu original, tout comme "Alien Syndrome", misait tout sur ses mécaniques ludiques et sa difficulté : on avait un objectif clair et unique, toute liberté pour atteindre cet objectif, et on affinait sa stratégie et son exécution de partie en partie. Ici, la structure est narrative, il n'y a qu'une seule et unique façon de progresser, le parcours de chaque niveau étant balisé par une suite de tâches immuable : aller à tel ordinateur, puis tel autre et encore tel autre, aller chercher telle clef à tel endroit pour ouvrir telle porte, aller chercher telle charge explosive pour détruire tel mur... les clefs ne sont plus ici que des objectifs scriptés parmi d'autres, ouvrant des portes précises ; elles ne sont plus une ressource que l'on doit gérer intelligemment dans le cadre d'une démarche d'exploration.
Il n'y a en fait ici ni exploration, ni véritable gestion des ressources. Le level design labyrinthique copié sur le jeu Amiga n'est qu'un leurre : en réalité, le jeu est strictement linéaire. On n'a même pas à se demander où aller : non seulement la cible courante est marquée sur la carte, mais le trajet pour s'y rendre est indiqué par le radar. Tout au plus peut-on faire de petits détours en chemin pour collecter des munitions et autres objets - on ne perd rien à le faire puisque cela ne coûte ni clefs ni munitions et que le temps n'est pas compté, les attaques ennemies sont scriptées et une zone "nettoyée" le reste donc définitivement. Étrangement, il n'y a même plus d'argent ni de magasin, les bornes Intex ne sont ici que des points de sauvegarde.


Bref, sur le fond, "Alien Breed Evolution" est calqué sur "Dead Space", et pas du tout sur un jeu de labyrinthe à la "Gauntlet", c'est purement un jeu d'immersion qui se joue comme on regarde un film, et en cela, il est typiquement moderne. Ce n'est pas un souci en soi, "Dead Space" faisant à mon avis partie des meilleurs jeux de cette génération ; mais si on veut faire du "Dead Space", il faut alors assumer et avoir les qualités de "Dead Space".
Or, "Alien Breed Evolution" n'a pas plus de mise en scène que le "Alien Breed" de l'Amiga : les objectifs sont très vagues, expliqués chacun par une simple ligne de texte peu lisible, toutes les allées et venues imposées par le jeu semblent donc arbitraires. Il n'y a pas de mouvement de caméra, pas vraiment d'histoire ou de personnages, pas de sentiment d'enjeu ou de suspens, et les salles, même si elles ont toutes une fonction et une apparence spécifiques, ont une forme trop souvent rectangulaire dans un agencement plat et compact, se fondant ainsi entre elles sans jamais donner le sentiment d'être des lieux réels en dépit du soin extrême qui leur a été apporté.
De même, les monstres sont particulièrement inintéressants. Il y en a peu de types différents, parmi lesquels trois se ressemblent à s'y méprendre : ceux qui chargent après avoir hurlé sont vaguement verts, et ceux qui tirent des projectiles ont le rostre rouge, mais en dehors de cela leur apparence est celle du monstre de base, et le jeu étant très sombre, on se contente la plupart du temps de tirer dans le tas sans finesse, ce qui marche tout aussi bien. De toute façon, le jeu nous demande juste de rester en vie jusqu'au bout de son script, et il suffit pour cela de maîtriser des mécaniques de jeu dual analog simples (typiquement, amener les monstres à être alignés dans un couloir, ou fuir pour les attendre derrière une porte et les tuer un à un).

En pratique, tout au long des cinq niveaux du jeu (une heure de jeu chacun si on les visite à 100%), on joue machinalement, l'esprit ailleurs, admirant le travail des graphistes mais ne se sentant jamais véritablement impliqué, ni dans le jeu en tant que tel, ni dans le jeu en tant qu'expérience.

Retour en force ("Alien Breed Assault")

Autant le dire tout de suite, "Alien Breed Assault" est mon préféré de la trilogie. Il est frappant de constater à quel point les quelques changements apportés à la formule de "Alien Breed Evolution" transforment l'expérience du joueur, un vrai petit cas d'école.


En fait, le gros des améliorations dont a bénéficié "Alien Breed Assault" a été incorporé dans la version PSN et Steam du premier volet de la trilogie, rebaptisée pour l'occasion "Alien Breed Impact" et sortie plus de six mois après la version XBLA... preuve que le jeu avait été publié sur Xbox 360 avant d'être vraiment fini ?

Parmi les nouveautés ayant bénéficié à la réédition du premier épisode, la plus évidente est le retour de l'argent et des magasins. On peut de nouveau ramasser des crédits un peu partout et les dépenser comme bon nous semble aux bornes Intex, et même y vendre nos munitions et nos objets. On ne peut pas y acheter d'armes, mais on peut améliorer celles que l'on a ramassées, soit en vitesse de rechargement, soit en débit, soit en dégâts infligés. Dans ce dernier cas, la nouvelle puissance de feu est très visible (et audible) quand on tire, ce qui est bien jouissif, surtout pour le lance-flamme, particulièrement satisfaisant à utiliser une fois boosté. De plus, on peut également amplifier l'effet de divers objets : soit la puissance des grenades, soit la vitesse d'utilisation et l'efficacité des kits de soins, soit la force de nos coups de crosse.
Ce simple degré de liberté accroît beaucoup notre implication dans le jeu, puisque cela autorise du coup différentes stratégies, les ressources devenant plus intéressantes à gérer : on peut complètement ignorer certains types d'objets ou d'armes et les vendre pour se cantonner à nos outils favoris, ou acheter toutes les munitions disponibles pour ne jamais courir le risque de se retrouver démuni (chaque borne n'a qu'un stock limité des diverses munitions), ou au contraire garder notre argent pour améliorer nos armes le plus tôt possible... tout cela devient vital au niveau de difficulté "Élite", les modes "Vétéran" et "Débutant" étant bien plus faciles.

Autre mise à jour notable : la variété des monstres. Les trois espèces au physique auparavant similaire sont maintenant clairement distinctes, on reconnaît les "hurleurs" et les "longues portées" du premier coup d'œil, et on peut donc réagir correctement à leur présence dans la meute, dynamisant les combats. De plus, "Alien Breed Assault" comporte de nouvelles espèces, toutes liées à une bonne idée, comme les "boucliers d'os" qui peuvent bloquer nos tirs (il faut faire feu au bon moment ou les attaquer à revers), ou les "fileurs" qui explosent une fois morts en laissant une zone collante derrière eux. Alors que "Alien Breed Evolution" n'avait qu'un boss pitoyable en fin de jeu, il y en a ici deux, bien plus spectaculaires, le second bénéficiant d'une excellente mise en scène.


À ce sujet, la mise en scène de "Alien Breed Assault", par sa simple existence, change la donne par rapport à l'épisode précédent, prenant acte de la nature narrative de la trilogie. Les objectifs sont bien plus clairs et dramatisés, Conrad allant de galère en galère en se faisant continuellement lâcher par la technique (thème typique de "ALIEN"). De longs moments calmes et glauques alternent avec des attaques soudaines et brutales, divers mouvements et angles de caméra confèrent de l'ampleur aux décors et à l'action, les situations se renouvellent avec des moments où l'on doit zigzaguer entre les flammes ou faire preuve de timing entre deux jets de vapeur toxique, on se retrouve dans des conduits de maintenance sous des plaques grillagées ou avec de l'eau trouble jusqu'à la taille... tout est fait pour briser la monotonie, donner un sens à ce que l'on fait, rendre les lieux oppressants et crédibles.

Le jeu est aidé en cela par son nouveau cadre : Conrad n'évolue plus ici dans le Leopold mais dans le UCS Aguirre, le vaisseau fantôme d'où viennent tous les monstres et les soucis. Naturellement, celui-ci est dans un état de délabrement avancé, avec une architecture de science-fiction médiévale à la "Event Horizon", grignoté par l'activité des bestioles depuis littéralement des siècles, et son organisation est très différente de celle du Leopold.
Alors que le Leopold affichait un level design très dense dans lequel il était très difficile de se repérer tellement tout s'y ressemblait, "Alien Breed Assault" est plus aéré, avec plus de personnalité et de direction dans ses salles et leur agencement, avec des zones circulaires, de petits ascenseurs, des passerelles en hauteur, des écluses, de grandes fosses avec d'énormes machineries... tout fait beaucoup moins plat et générique, le vaisseau semble avoir une âme, et la forme de chaque zone suggère l'action et crée la tension. L'aspect usé et même pourri du Aguirre contribue aussi à cela, sans pour autant rendre les graphismes ternes - ils restent toujours aussi colorés.

Étonnamment, la dimension narrative du jeu est elle aussi très satisfaisante. On peut trouver des journaux intimes dans le Aguirre qui racontent partiellement ce qui s'y est passé, apportant la révélation que les monstres que l'on combat sont la création artificielle d'un scientifique, le docteur Walter Emerson Klein. Ces logs sont bien écrits, la personnalité du docteur Klein est suffisamment inquiétante, et surtout, les enjeux et les personnages sont correctement exposés lors des cinématiques et de l'action elle-même ; on se surprend à éprouver un attachement croissant pour MIA l'androïde et à appréhender la suite des événements...


J'aurais pu résumer tout ce qui précède en une seule formule, j'aurais pu tout simplement dire que "Alien Breed Assault" a su copier chaque caractéristique de "Dead Space" au point d'en être son équivalent XBLA. Mais autant cela décrirait plutôt bien le dernier volet de la trilogie, "Alien Breed Descent", autant ce serait ici incomplet : une des raisons qui font que j'aime "Alien Breed Assault", et qui n'est pas présente dans "Dead Space", est que l'on peut y retrouver en partie le gameplay d'un jeu de labyrinthe. Et cela, pour moi, est un énorme point positif.

Il y a vingt-cinq ans, personne ne levait un sourcil à l'idée de devoir évoluer librement dans un jeu comptant 256 salles, sans carte, avec des zones en apparence strictement identiques et des passages secrets complètement invisibles. Sans penser à se plaindre, on cartographiait sagement ses jeux soi-même au crayon à papier, on s'émerveillait des plans publiés par les magazines de jeu, et les passages secrets étaient considérés comme de bonnes surprises à partager entre amis.
Aujourd'hui, en partie parce que le jeu vidéo veut copier le cinéma de divertissement et en partie parce qu'il cherche à plaire à un public très large, il est non seulement scandaleux d'avoir des passages secrets invisibles, scandaleux de ne pas disposer d'une carte automatique extrêmement complète, scandaleux d'exiger de longs allers-retours, mais on en est à un point où est devenue scandaleuse l'idée même de demander au joueur de savoir se repérer dans un environnement - raison pour laquelle à peu près tous les jeux modernes sont linéaires ou ultra guidés.
Autrefois, savoir s'orienter (ou savoir bien gérer son temps) était un effort que l'on avait le droit de demander au joueur, de la même façon qu'on peut toujours lui demander de savoir sauter de plateforme en plateforme ou de savoir aligner un viseur avec une cible. Maintenant, cette exigence est considérée comme un défaut objectif, qui sera mentionné dans les points négatifs en fin de critique puis sanctionné dans le score. Dans ce contexte, on imagine le casse-tête qu'est la série des "Metroid" pour Nintendo.

En conséquence, je ne me suis jamais attendu à ce que le reboot de "Alien Breed" ait un gameplay qui s'approche de celui du jeu original ; j'ai donc été agréablement surpris d'avoir l'option, dans "Alien Breed Assault", de pouvoir couper les points de navigation. Ces derniers sont l'équivalent de la "ligne d'objectif" qui nous guide dans "Dead Space" lorsqu'on presse le stick droit : quand ils sont désactivés, seule la cible finale est marquée sur la carte (parfois au milieu de nulle part) et non plus le chemin pour y aller ; c'est à nous de trouver comment nous y rendre, à l'ancienne.


L'option, également ajoutée avec bonheur à la version PSN et Steam de "Alien Breed Evolution", correspond encore davantage au level design de "Alien Breed Assault", à la fois bien lisible (on différencie facilement chaque zone) et comportant suffisamment d'intersections. Et donc, on consulte régulièrement la carte, on explore une branche, on fait demi-tour, on s'assure que l'on n'a rien négligé, on se familiarise avec les lieux ; et ceux-ci, avec l'aide des nombreuses phases calmes du jeu, en acquièrent une certaine authenticité : on a réellement l'impression d'être seul dans un vaisseau pourrissant rempli de monstres qui progresse lentement le long d'une trajectoire de collision avec une planète glacée, et d'avoir à soi-même trouver une solution pour tout arranger.

Bien sûr, ce gameplay de jeu de labyrinthe ne va pas chercher très loin, comme toutes les autres caractéristiques déjà citées, mais l'ensemble se combine en un jeu auquel j'ai eu énormément de plaisir à jouer, et qui m'a paru sans problème être digne de porter le nom de "Alien Breed" (il faut aussi noter que le jeu a maintenant un mode bonus de "survie" qui est tout à fait correct).

Clôture ("Alien Breed Descent")

Sur le papier (et comme l'ont fait remarquer la plupart des critiques), "Alien Breed Descent" ne propose pas grand-chose de neuf par rapport au chapitre précédent. Le gameplay est le même, les différents modes de jeu sont les mêmes, le cadre est toujours le même... les deux armes les plus puissantes ont encore changé par rapport au jeu précédent, mais "Alien Breed Assault" avait les meilleures... il y a une nouvelle race extraterrestre, mais elle est anecdotique... il y a bien trois nouveaux boss, mais ils ne sont pas franchement inoubliables...

L'intérêt du jeu, cependant, est ailleurs. Le cadre est bien le même, mais pas le contexte : Conrad est maintenant seul face à Klein, qui a survécu pendant des siècles sous forme informatique, et le Aguirre s'écrase lentement sur la planète d'où sont issues les créatures que l'on combat (Klein s'est servi de parasites locaux pour ses manipulations génétiques). Et donc, le Aguirre tombe en ruine dans un festival pyrotechnique, ses couloirs jusque-là bien rangés s'effondrant les uns sur les autres, des projectiles perçant sa coque, l'eau glacée de la planète s'infiltrant un peu partout après le crash - pendant que Klein nous parle inlassablement, nous imposant son considérable ego, nous narguant et nous jouant des tours.


Bref, le jeu est un ride, il reprend parfaitement la structure de train fantôme de "Dead Space", avec une action très soutenue et un niveau de difficulté "Élite" éprouvant. On a toujours la possibilité de supprimer les points de navigation, mais ce ne serait ici qu'un contretemps superflu : "Alien Breed Descent" est strictement linéaire, coupant notre route avec un plancher qui s'effondre pendant qu'un couloir en éventre un autre, créant une nouvelle voie. C'est un long final de film catastrophe, qui dure cinq heures si on est méthodique et qu'on tient à ramasser toutes les munitions et objets divers (au niveau de difficulté "Élite", c'est plus prudent).

La formule fonctionne très bien, elle produit un jeu au fond assez différent de "Alien Breed Assault", et l'acteur qui joue Klein fournit une très bonne performance lors de monologues bien écrits. Malheureusement, ses répliques ne sont pas sous-titrées pendant l'action, et même en comprenant l'anglais correctement, il est difficile de tout suivre avec des explosions, des bruits d'armes, et des hurlements bestiaux en arrière-fond. La confrontation finale, sans être dantesque, est satisfaisante, l'envie de Conrad de régler ses comptes avec Klein étant très communicative tout au long du jeu. La cinématique de fermeture (réalisée sous un format de bande dessinée de bonne qualité, comme toutes les autres) est glaçante, à l'image de la noirceur distanciée typique de la trilogie.

Un reboot de qualité, des jeux bien distincts

On l'aura compris : je recommande chaudement la trilogie "Alien Breed" aux joueurs PC et PS3, d'autant que la version "en boîte" doit maintenant se trouver pour une bouchée de pain (sans parler des promotions de Steam), et je recommande les deux derniers chapitres de la trilogie aux joueurs sur Xbox 360. Le jeu est tout simplement magnifique, et a un charme particulier avec sa forme "arcade" et son fond très narratif (ou cinématographique, si on préfère), comme un "Dead Space" plus direct, plus accessible, plus rejouable, se prenant moins au sérieux. Il dispose aussi d'un mode pour deux joueurs, que je n'ai pas commenté parce que je n'ai pas vraiment pu y jouer, mais qui a l'air très compétent.

Au final, j'ai déjà passé plus de dix heures sur chaque jeu, ayant battu chacun deux fois (une en "Vétéran" en visant l'obtention des succès de collecte et une en "Élite"), ce qui doit m'amener à une quarantaine d'heures si je tiens compte des modes "survie" : je suis un client de Team17 heureux et reconnaissant.


Plus largement, et c'était l'idée derrière cet article, je suis fasciné de voir à quel point des jeux en apparence si similaires peuvent être sur le fond si distincts. "Alien Syndrome", "Alien Breed" et "Alien Breed Trilogy" sont tous radicalement différents, représentant chacun trois ères du jeu vidéo : l'arcade, le jeu sur micro-ordinateur avant les PC, et finalement, la formule narrative qui copie le cinéma de divertissement et qui s'est imposée aujourd'hui. Chacune fournit ici des résultats excellents (avec l'exception du faux pas de "Alien Breed Evolution", le cul entre deux chaises), chacune a nourri ma passion sans borne pour "ALIEN".

J'attends la prochaine ère avec curiosité.

1 commentaire

Tissora a dit…

Etant nostalgique du premier Alien Breed sur AMIGA (ah les parties en mode coopération) mais n'ayant pas le temps et les compétences pour me lancer dans l'émulation Amiga afin de pouvoir y rejouer, je me suis procuré cette nouvelle trilogie pur une bouchée de pain (1,50€ !) via Steam.

Merci pour votre article sur le sujet.
Je partage effectivement votre vue sur l'évolution des jeux vidéo à travers ce reboot (ou remake).

J'ai commencé Impact et je prends plaisir à jouer, c'est bien là le principal.